+†+Yesus Kristus azu+†+

« Il n’est pour l’âme aliment plus suave que la connaissance de la vérité » (Lactance)

Les fondements bibliques de la Papauté (4) : Jean XXI, 15-17 : le Christ confie à saint Pierre la charge de Son troupeau

Dossier sur la Papauté : ici

imageDieu avait prévu de toute éternité de faire de l’Apôtre Simon-Pierre, la pierre de fondement de son Église et le premier chef de celle-ci. C’est pourquoi le Christ change son nom de Simon en Céphas, ce qui veut dire Pierre en araméen dès son recrutement (Jean I, 42). Aussi, après lui avoir promis de faire de lui cette pierre de fondement suite à sa confession de foi (Matthieu XVI, 18), de lui donner les clés du Royaume des Cieux et d’en faire ainsi son intendant sur terre (Matthieu XVI, 19), et pour qu’il puisse exercer cette fonction sans risque pour la foi des chrétiens, lui avoir promis que sa foi ne défaillirait pas (Luc XXII, 32). Il lui a enfin, après sa Résurrection, donné la charge de paître tout Son troupeau et a ainsi réalisé ses promesses de Matthieu XVI, 18-19 et fit de lui effectivement le premier Pape.

Voici le plan de notre étude :

I) Preuves tirées de l’Ecriture Sainte

A) La collation du pouvoir suprême en Jean XXI, 15-17

B) Que signifie ces mots ?

C) Le Christ donne à saint Pierre le pouvoir de « gouverner » d’après le terme grec

1) Un pouvoir de « gouverner » identique à celui du Christ dans l’Apocalypse

2) Un pouvoir de gouverner lié à Matthieu XVI, 19

3) Une triple injonction correspondant aux trois pouvoirs donnés à saint Pierre avec les verbes correspondant

D) Un pasteur luthérien reconnaît le parallèle entre la mission confiée par le Christ à saint Pierre à celle donnée par Moïse à Josué

II) Réponse à une objection : le Christ n’aurait dit cela que pour rétablir Pierre dans l’apostolat après son triple reniement

III) Preuves tirées de la Tradition

A) L’interprétation des Pères de l’Eglise

B) L’interprétation d’un évêque du IIè millénaire reconnu comme saint par l’église orthodoxe mais pas par l’Eglise catholique

C) Le IIIè concile de Constantinople : une preuve définitive pour les Orthodoxes, gallicans, vieux-catholiques et tous ceux qui reconnaissent l’autorité des conciles sans reconnaître celle des Papes

I) Preuves tirées de l’Ecriture Sainte

A) La collation du pouvoir suprême en Jean XXI, 15-17

Cette charge, le Christ lui donne dans le passage suivant :

« Lorsqu’ils eurent mangé, Jésus dit à Simon-Pierre : « Simon, fils de Jean, m’aimes-tu plus que ceux-ci ? » Il lui répondit : « Oui, Seigneur, vous savez que je vous aime. » Jésus lui dit : « Pais mes agneaux. » Il lui dit une seconde fois : « Simon, fils de Jean, m’aimes-tu ? » Pierre lui répondit : « Oui, Seigneur, vous savez bien que je vous aime. » Jésus lui dit : « Pais mes agneaux. » Il lui dit pour la troisième fois : « Simon, fils de Jean, m’aimes-tu ? » Pierre fut contristé de ce que Jésus lui demandait pour la troisième fois : « M’aimes-tu ? » et il lui répondit : « Seigneur, vous connaissez toutes choses, vous savez bien que je vous aime. » Jésus lui dit : « Pais mes brebis. » » (Jean XXI, 15-17)

B) Que signifie ces mots ?

Avant de lui confier le soin de paître ses agneaux et ses brebis, le Christ lui demande trois fois s’il l’aime. En effet, n’oublions pas que cet Apôtre l’avait renié trois fois de bouche, par peur, même si le cœur n’y était pas (Matthieu XXVI, 69-75; Luc XXII, 54-62; Jean XVIII, 25-27). Le Christ lui fait donc expier sa faute avant de lui confier le troupeau. Il lui fait expier par trois manifestations d’amour, car comme il est écrit :

« La charité couvre la multitude des péchés » (I Pierre IV, 8) et « La charité couvre toutes les fautes » (Proverbes X, 12)

Maintenant, après avoir éprouvé Pierre, il lui confie sa mission :

« PAIS MES AGNEAUX », c’est-à-dire ceux qui croient en moi, ceux que moi, l’Agneau, j’appelle « mes agneaux » – « Voici l’ Agneau de Dieu, voici celui qui enlève les péchés du monde » (Jean I, 29). Cela pour qu’on ne puisse pas appeler « chrétien » celui qui affirme qu’il n’est pas sous la garde de ce pasteur, c’est-à-dire de Pierre – « Un seul pasteur sera pour eux tous » (Ezéchiel XXXVII, 24). – « Et ils se donneront un seul chef » (Osée I, 11) » (Saint Thomas d’Aquin)

Il convenait que le Christ confiât cette mission à Pierre de préférence à tous les autres, lui qui, selon saint Jean Chrysostome, « Entre les apôtres, Pierre était le plus grand et le plus éminent », aussi bien porte-parole des disciples que tête du collège (collegium) (In Ioannem hom., LXXXVIII, 1 ; PG 59, col. 478)

De même que dans notre article sur Matthieu XVI, 18 et celui sur Luc XXII, 32, nous laisserons la parole à Dom Prosper GUÉRANGER, OSB, Abbé de Solesmes :

« En saint Jean, chapitre XXI, Jésus-Christ, en présence de ses apôtres, demande à saint Pierre l’assurance de son amour. Par deux fois il lui dit : « Pais mes agneaux, » et une dernière fois : « Pais mes brebis. » La conversion de Pierre avait eu lieu, le Sauveur sous peu de jours allait quitter la terre, le moment était venu d’établir dans ses fonctions celui que Jésus avait annoncé, lorsque parlant de son Église, il avait dit : « Il n’y aura qu’une seule bergerie et un seul Pasteur. » [Jean X, 16] De même qu’il avait admis Simon fils de Jean en participation de sa qualité divine de Pierre, ainsi, après s’être lui-même représenté sous le nom et les traits d’un Pasteur [Jean XI, 14], il lui conférait ce même titre sur le troupeau tout entier, sur les agneaux et sur les brebis. Il est d’autres Pasteurs qui paissent le troupeau, mais Pierre est le Pasteur des Pasteurs, et par là, l’unité est dans la bergerie. […]

La première charge du Pasteur est d’enseigner le troupeau ; car le troupeau ne peut vivre que de la vérité. Si le Pasteur qui paît les agneaux et les brebis au nom du Maître, enseignait l’erreur, ou il pervertirait les agneaux et les brebis qui sont sous sa garde, et le troupeau périrait ; ou les brebis repousseraient le Pasteur, et l’unité ne serait plus dans la bergerie. Or, les promesses de Jésus-Christ nous assurent que ni l’un ni l’autre de ces malheurs n’est possible, puisqu’il s’ensuivrait le renversement de l’Église ; il faut donc conclure que le Pontife romain, par cela même qu’il est le Pasteur universel, jouit de l’infaillibilité personnelle dans la doctrine. » (De la Monarchie Pontificale, 2è édition, 1870, pp. 144-145)

Vous vous demandez peut-être pourquoi le Christ parle d’abord d’agneaux et ensuite de brebis. Le Christ signifie par là qu’il confie à saint Pierre l’intégralité de Son troupeau: les agneaux signifient les fidèles et les brebis signifient les évêques et les prêtres. En effet, les brebis sont celles qui mettent au monde et qui nourrissent les agneaux, de même, les évêques et les prêtres, par les moyens de la prédication et des sacrements, enfantent les fidèles à Dieu et les nourrissent spirituellement.

C) Le Christ donne à saint Pierre le pouvoir de « gouverner » d’après le terme grec

1) Un pouvoir de « gouverner » identique à celui du Christ dans l’Apocalypse

Mais le fait majeur, c’est que quand Jésus dit ‘Pais mes agneaux, Pais mes brebis, Pais mes brebis’ , le deuxième verbe de ces trois ordres du Christ est le mot grec ‘poimaine’. Beaucoup de Bibles traduisent les trois verbes de la même façon : ‘pais’ ; mais en fait, le deuxième verbe diffère vraiment du premier et du troisième.

Jean XXI,15-17 – « Il lui dit : Pais [Βόσκε : boskè] mes agneaux… Il lui dit : Dirige [Ποίμαινε : poïmaïne] mes brebis… Jésus lui dit : Nourris [Βόσκε : boskè] mes brebis »

Dans le premier et le troisième ordres que Jésus donne à St Pierre à propos de Son troupeau, le verbe grec est ‘boske’ ; qui veut dire ‘nourrir, paître’. Mais le verbe ‘poimaine’, le deuxième ordre de Jésus à Pierre, signifie ‘diriger, gouverner’. On peut aussi le traduire par ‘s’occuper de’. Ainsi, Jésus n’ordonna pas seulement à Pierre de nourrir Son Eglise : il doit la diriger. C’est fascinant de voir qu’une forme similaire au verbe ‘poimaine’ – que Jésus utilisa dans Jean XXI, 16 pour décrire l’autorité de Pierre sur le troupeau – est également utilisée dans l’Apocalypse :

« Et à celui qui vaincra et qui gardera jusqu’à la fin mes œuvres, je lui donnerai pouvoir sur les nations ; il les gouvernera [ποιμανεῖ : poïmaneï] avec un sceptre de fer, ainsi que l’on brise les vases d’argile » (Apocalypse II, 26-27)

« Or, elle donna le jour à un enfant mâle, qui doit gouverner [ποιμαίνειν : poïmaïneïn] toutes les nations avec un sceptre de fer ; et son enfant fût enlevé auprès de Dieu et auprès de son trône, » (Apocalypse XII, 5)

Ça signifie que Pierre a non seulement la primauté sur le troupeau du Christ, mais une primauté de juridiction pour gouverner le troupeau.

2) Un pouvoir de gouverner lié à Matthieu XVI, 19

Lorsque l’Apocalypse nous montre le gouvernement du Christ, elle dit aussi :

« Ecris encore à l’ange de l’Eglise de Philadelphie : Voici ce que dit le saint, le Véritable, Celui qui a la clef de David, Celui qui ouvre et personne ne ferme, qui ferme et personne n’ouvre » (Apocalypse III, 7)

Or le Christ confie cette clé à Pierre en Matthieu XVI, 19 !

Il y a donc un un lien entre le pouvoir donné par le Christ à saint Pierre en Matthieu XVI, 19 et le pouvoir des clés de David exercé par le Christ lui-même dans l’Apocalypse. Or le Christ souverain de l’Apocalypse, non seulement exerce le pouvoir des clés de David, mais aussi « gouverne » d’après le même verbe employé en Jean XXI, 16, prononcé à l’intention du même saint Pierre.

Nous avons là une preuve qu’en Jean XXI, 15-17, le Chist fait à saint Pierre la promesse de lui remettre la réalité du pouvoir sur son royaume qu’est l’Eglise, comme à un « vicaire » comme dit l’Eglise catholique, c’est-à-dire comme « remplaçant », « tenant la place de », « celui qui exerce en second les fonctions attachées à un office ».

3) Une triple injonction correspondant aux trois pouvoirs donnés à saint Pierre avec les verbes correspondant

Cela correspond aux trois fonctions que le Christ donna à son Église, donc aux Apôtres et particulièrement à saint Pierre leur chef, et à tous les Papes par la suite:

  • enseigner et préserver la vraie doctrine, c’est à dire nourrir par la parole. Nourrir est l’une des fonctions de celui qui doit paître.
  • diriger l’Église par la discipline
  • la sanctification par les prières, la messe, les sacrements etc. C’est une autre nourriture.

En effet, enseigner la doctrine et administrer les sacrement correspond à nourrir les âmes des chrétiens, tandis ce que la direction matérielle de l’Eglise relève du gouvernement.

D) Un pasteur luthérien reconnaît le parallèle entre la mission confiée par le Christ à saint Pierre à celle donnée par Moïse à Josué

Cette exégèse catholique est rejointe par celle d’un non-catholique qui en est venu à reconnaître l’évidence. Il s’agit de Roger David AUS, pasteur de l’Église évangélique Luthérienne d’Amérique, membre de la Société de la Littérature Biblique et de la Société des Études du Nouveau Testament. Il pense que Jean XXI, 15-17 nous montre que la mission donnée par le Christr à saint Pierre est la réalisation du type vétérotestamentaire de celle confiée par Moïse (lui-même type du Christ) à Josué. Il expose cela dans son livre intitulée Simon Peter’s Denial and Jesus’ Commissioning Him as His Successor in John 21: 15-19 (2013). Il y démontre comment Josué dans l’Ancien Testament, qui fut à le tête des Hébreux entrant en Canaan, commissionné par Moïse, était un archétype de Pierre, commissionné par le Christ pour paître son troupeau jusqu’au Royaume des Cieux. Je vous invite à lire le livre en entier si vous comprenez l’anglais, mais en voici d’ores et déjà quelques morceaux traduits:

« Simon Pierre reçut de lui [le Christ] la commission de paître/nourrir spirituellement les membres de la communauté Chrétienne. Cela n’est pas une commission pour missionner, ce que Pierre fera plus tard (comme dans Actes 12:9, voir 1 Cor 9:5 et Gal 2:8). Plutôt, Simon Pierre reçoit ici une commission autoritaire d’être le leader spirituel de quiconque dans la communauté Chrétienne, du nouveau converti ou baptisé (les agneaux), des jeunes membres en passant par les matures, qui sont nés et ont grandi comme Chrétiens. Josué reçut une commission du grand berger d’Israël, Moïse, faisant que par son autorité sur eux ‘‘l’assemblée du Seigneur ne sera pas semblable à une brebis sans berger”. Cela produit la part d’autorité que Josué reçoit de Moïse. De la même manière Jésus, le Bon Berger de Jean 10, accorde à Simon Pierre en 21:15-17 l’autorité d’être son successeur dans l’entretien nourricier de la communauté Chrétienne. Il est leur leader spirituel, les nourrissant dans la foi. […]

Les Chrétiens Juifs Palestiniens, aussi bien que beaucoup de Chrétiens Juifs hellénistiques ressentaient les échos en Jean 21:15-19 des traditions judaïques bien connues de passation avec la commission de Moïse à son disciples Josué pour être son successeur, le nouveau berger d’Israël, juste avant qu’il ne meure. Ces traditions furent basés sur Nombres 27:12-23, Cantique 1:7-8 et Osée 11:1 […]

Comme souligné auparavant, Moïse était considéré comme le premier rédempteur d’Israël dans la tradition Judaïque. Le grand et dernier rédempteur devait être le Messie. Cette typologie fait qu’il était facile pour les Chrétiens Juifs Palestiniens d’emprunter les motifs et les expressions exactes de la succession de Moïse relative à son autorité juste avant qu’il ne meure à son disciple Josué, pour les appliquer à la transmission de l’autorité de Jésus le Bon Berger à son successeur Simon Pierre juste avant qu’il ne disparaisse finalement devant son ses premiers témoins de sa Résurrection. Tout comme Josué devait guider les Israélites ‘‘de sorte que l’assemblée du Seigneur ne soit pas semblable à une brebis sans berger’’ [Nombres XXVII, 17], maintenant Simon Pierre devrait devenir ‘‘le’’ berger de la communauté Chrétienne. Comme leader, il devra la guider et protéger ses membres, incluant les plus jeunes, ceux au meilleur de la vie et les plus vieux. »

II) Réponse à une objection : le Christ n’aurait dit cela que pour rétablir Pierre dans l’apostolat après son triple reniement

Les adversaires de la Papauté rétorquent que cette triple demande de pardon, suivie de la triple remise du troupeau, n’avait aucun autre but que de rétablir saint Pierre dans sa pleine charge d’apôtre, par suite de son triple reniement.

La vérité est que s’il est évident que ce triple pardon fait suite au triple reniement, car ce dernier devait être lavé, il est en revanche faux que cela eut comme unique but de rétablir Pierre dans l’apostolat. En effet, si cela n’avait pas eu d’autre but, alors il y aurait eu une scène identique pour tous les apôtres, car tous les apôtres ont apostasié ! En effet, le Christ leur avait explicitement prophétisé à plusieurs reprises qu’Il souffrirait, mourrait, mais ressusciterait le troisième jour (Matthieu XVI, 21 ; XVII, 7-9 ; XX, 17-19 ; Marc VIII, 31 ; IX, 31 ; X, 33-34). Et pourtant, dès la Passion passée, et jusqu’à ce que Jésus ne se manifeste à eux après sa Résurrection, ils avaient tous perdu la foi ! Même lorsque les saintes femmes vinrent leur dire qu’Il n’était plus au tombeau, ils ne voulurent pas les croire (Matthieu XXVIII, 1-10 ; Marc XVI, 11 ; Luc XXIV, 11) ! Il fallut que saint Pierre et saint Jean se rendent sur place pour constater le fait et en témoignent aux autres pour les en convaincre (Luc XXIV, 12 ; Jean XX, 1-10) ! Dans une apparition du même jour, le Christ leur reprocha leur incrédulité (Marc XVI, 14) ! Mais lorsque ces deux apôtres firent leur rapport, saint Thomas était absent, aussi lorsque les Dix restant lui rapportèrent la Résurrection, il ne les crut pas, affirmant : « Si je ne vois dans ses mains la marque des clous, et si je ne mets mon doigt à la place des clous, et ma main dans son côté, je ne croirai point » (Jean XX, 24-25) ! Et lorsque Jésus lui apparut, Il le tança de son manque de foi, lorsqu’il refusa de voir sans croire, même au témoignage de tous les autres apôtres (Jean XX, 19-31) !

Ainsi, si la scène de Jean XXI, 15-17 n’avait pas d’autre but que de rétablir saint Pierre dans l’apostolat, alors après cela Jésus aurait soumis tous les autres apôtres, surtout saint Thomas, à une pareille pénitence. Ainsi donc, cela signifie qu’il y a quelque chose de plus que le simple rétablissement de l’apostolat : la collation de l’Autorité universelle !

III) Preuves tirées de la Tradition

A) L’interprétation des Pères de l’Eglise

Eusèbe d’Émèse (vers 300-avant 359)

C’est ce qu’exprime avec tant de vérité cet ancien évêque pourtant hérétique, prouvant ainsi l’antiquité de cette doctrine :

« Le Christ, dit-il, confie d’abord à Pierre les agneaux, puis les brebis, parce qu’il ne le fait pas seulement Pasteur, mais Pasteur des Pasteurs. Pierre paît donc les agneaux et il paît aussi les brebis ; il paît les petits et il paît les mères ; il gouverne les sujets et ceux qui leur commandent. Il est donc le Pasteur de tous ; car après les agneaux et les brebis, il n’y a plus rien dans l’Église. » (Homil. in Vigilia SS. Apost. — Biblioth. PP. Lugd. Tom. VI, pag. 794.)

Saint Ambroise de Milan (vers 340-397) 

« Le Seigneur… l’a choisi comme étant le pasteur du troupeau du Seigneur. Car Il lui a dit : et toi, quand tu seras converti, confirme tes frères [Luc XXII, 32]. » (Commentaire du psaume 43, 40, PL 14, 1163)

L’Ambrosiaster

Cet auteur anonyme évoque l’incident d’Antioche sans remettre en cause l’autorité de saint Pierre sur toutes les Eglises qu’au contraire il affirme :

« Il est bien vrai qu’il [saint Paul] devait être bien angoissé en voyant Pierre ; pour lui qui était le premier parmi les apôtres, et fut délégué par le Sauveur aux soins des Églises. » (Commentaire sur l’Épître aux Galates, PL 17, 369)

Saint Optat de Milève (mort vers 397)

Cet évêque, cité par saint Augustin aux côtés d’hommes disparus depuis longtemps, cet évêque « de vénérable mémoire » apparaît comme l’égal d’Ambroise de Milan, entend désigner avec cette prérogative de la chaire la note d’apostolicité, qui se trouve chez tous ceux qui sont en communion avec cette chaire, où réside la source et l’origine du pouvoir apostolique. Il met cela en lien avec son triple pardon en disant que c’est à ce moment là que Pierre devint chef :

« Pour le bien de l’unité, le béni Pierre, pour qui il aura suffi que, après son reniement, il n’eût obtenu que le pardon, pour mériter d’être préféré à tous les Apôtres, et seul il a reçu les clefs du Royaume des Cieux pour les communiquer aux autres. » (Contre les donatistes, Contre Parménien, Livre VII, Chapitre 3 ; PG 11/1087)

Saint Jean Chrysostome (vers 346-407)

« Et ce Fils lui-même, pourquoi a-t-il versé jusqu’à la dernière goutte de son sang? si ce n’est pour racheter les brebis qu’il a remises aux mains de Pierre et de ses successeurs. Jésus-Christ disait encore : Quel est le serviteur fidèle et prudent que son maître a établi pour gouverner sa maison? (Matth. XXIV, 45.) Voilà encore des paroles qui ont l’apparence du doute; mais celui qui les prononçait ne doutait pas davantage en les prononçant, que lorsqu’il demandait à Pierre s’il l’aimait, moins pour s’assurer de son amour que pour montrer la grandeur du sien. De même ici quand il demande : Quel est le serviteur fidèle et prudent? Jésus-Christ le connaît assez: seulement il veut nous montrer la rareté de tels serviteurs et la grandeur de leur ministère. Qu’on en juge par la grandeur de la récompense qu’il leur destine : Je vous dis en vérité qu’il l’établira sur tous ses biens. (Matth. XXIV, 47.) Soutiendras-tu maintenant que ce n’est pas pour ton bien que je t’ai trompé ? Toi qui vas être préposé au gouvernement des biens de Dieu, charge qui a valu à saint Pierre sa puissance et sa haute prééminence sur le reste des apôtres, selon cette parole : Pierre, dit le Seigneur, m’aimes-tu plus que ceux-ci ? pais mes brebis. (Jean XXI, 15.) Il aurait pu dire : si tu m’aimes, jeûne, couche sur la dure, veille sans cesse, protège les opprimés, sois le père des orphelins, le défenseur de la veuve ; mais non: laissant là toutes ces oeuvres, que dit-il? Pais mes brebis. » (Du sacerdoce, II, 1-2PG 48, 631-633)

« Il y a bien des moyens propres à nous mettre en crédit auprès de Dieu, et à nous rendre illustres et agréables à ses yeux. Mais c’est la sollicitude à l’égard du prochain qui l’emporte sur tout, et qui nous attire le plus sûrement la bienveillance et la protection du Seigneur; c’est là aussi ce que le Christ exige de Pierre, car, après le dîner, « Jésus dit à Simon Pierre: Simon, fils de Jean, m’aimez-vous plus que ne font ceux-ci? Il lui répondit : Oui, Seigneur, vous savez que je vous aime. Jésus lui dit : Paissez mes agneaux ». Et pourquoi Jésus-Christ, laissant là les autres apôtres, parle-t-il à Pierre seul de ce soin et de cet amour? Entre les apôtres, Pierre était le plus grand et le plus éminent; il était la langue et le chef du collège : c’est pour cela que Paul le fut voir préférablement aux autres. En même temps, Jésus-Christ voulait rassurer Pierre, et lui montrer que la souillure de son renoncement était effacée : c’est pourquoi il lui confie le gouvernement de ses frères, et il ne lui rappelle, il ne lui reproche point son renoncement, mais il lui dit : Si vous m’aimez , recevez le gouvernement de vos frères : montrez maintenant l’ardent amour que vous avez toujours fait paraître, et dont vous vous glorifiiez; la vie que vous vouliez donner pour moi, donnez-la pour mes brebis. […]

Et après « avoir ainsi parlé , il lui dit : Suivez-moi ». Par ces paroles, saint Jean fait connaître que le Sauveur avait un grand soin de Pierre, et un grand amour pour lui. Que si quelqu’un dit : Pourquoi donc saint Jacques a-t-il été élevé sur la chaire de Jérusalem? Je répondrai que si Pierre ne fut point élevé sur cette chaire, c’est que Jésus-Christ l’établit pour être le docteur de tout le monde. « Pierre s’étant retourné, vit venir après lui le disciple que Jésus aimait, qui , pendant la cène, s’était reposé sur son sein », et dit à Jésus : « Et celui-ci, Seigneur, que deviendra-t-il ? » […]

Pour quelle raison l’évangéliste rappelle-t-il qu’il s’était reposé sur le sein du Seigneur? Ce n’est pas sans sujet , c’est pour montrer combien était grande la confiance que Pierre, après son renoncement, avait en son Maître. Car c’est Pierre, celui-là même qui n’osait alors interroger, et qui faisait signe à un autre de le faire pour lui, qui reçoit alors le gouvernement de ses frères, et qui non-seulement ne confie plus ses intérêts à un autre, mais qui même interroge son Maître sur le sort d’autrui. Jean reste dans le silence; lui il parle, il interroge. Enfin, l’évangéliste fait aussi connaître l’amour que Pierre avait pour lui, car Pierre aimait beaucoup Jean, comme la suite de l’histoire le fait voir : et cette étroite amitié se montre à découvert et dans tout l’Evangile, et dans les actes des Apôtres.

Comme donc le Seigneur avait annoncé de grandes choses à Pierre, comme il lui avait confié le gouvernement du mondelui avait prédit le martyre qu’il devait souffrir, lui avait donné: de plus grands témoignages d’amour qu’à ses autres disciples, Pierre désirant de faire participer Jean à toutes ces grâces, dit : « Et celui-ci, Seigneur, que deviendra-t-il ? » Ne marchera-t-il pas dans la même voie que nous? Et de même que dans le temps qu’il n’osait interroger, il avait engagé Jean à le faire pour lui, ainsi maintenant il lui rend la pareille ; et, pensant bien que ce disciple aurait voulu demander à son Maître ce. qu’il deviendrait et qu’il ne l’osait pas, il le demande lui-même. […]

« Il courut sur cela un bruit parmi les frères » , c’est-à-dire, parmi les disciples, « que celui-ci ne mourrait point. Jésus, néanmoins, n’avait pas dit : Il ne mourra point, mais : si je veux qu’il demeure jusqu’à ce que je vienne, que vous importe (23) ? » Ne pensez pas, dit le Seigneur, que je veuille disposer de vous tous d’une même manière; il avait en vue, en disant cela, leur attachement mutuel. Comme ils devaient bientôt être chargés du soin de toute la terre, il ne fallait pas qu’ils s’attachassent ainsi les uns aux autres, ce qui aurait été très-préjudiciable au monde. C’est pourquoi le Sauveur dit à Pierre : Je vous ai confié une grande charge, donnez-y tous vos soins, remplissez-en les devoirs, combattez, luttez. Et que vous importe, si je veux que Jean demeure? Pour vous, attachez-vous à ce qui vous regarde, et appliquez-y toute votre attention. Considérez ici, je vous prie , mes frères, combien l’évangéliste est exempt de vanité. Après avoir rapporté l’opinion des disciples, il la corrige, comme s’ils n’avaient point compris les paroles de Jésus-Christ, et dit. « Jésus, néanmoins, n’avait pas dit : Il ne mourra point, mais : si je veux qu’il a demeure ». » (Commentaire sur l’Evangile selon St Jean, 88 (alias 87), 1 et 2, Saint Jean Chrysostome — Oeuvres complètes ; sous la direction de M. Jeannin , L. Guérin & Ce, Éditeurs 1865, Tome 8, Chapitre 88 , page 553, PG 59, 478 à 480)

Saint Augustin (354-430)

« Nous célébrons donc la naissance du premier et du dernier des saints Apôtres. Vous avez, j’en suis sûr, compris ce que je viens de dire; mais parce que vous l’avez compris, est-ce pour nous un motif de nous taire ? Si vous faites en ce jour votre devoir, avons-nous le droit de demeurer inoccupés ? Vous avez fait une profession solennelle , nous devons donc vous adresser un discours quelconque, afin que nous acquittions tous, publiquement, notre dette de dévotion. Pierre est donc le premier des Apôtres, et Paul en est le dernier. » (Sermon 8, pour la fête des saints apôtres Pierre et Paul. I., 2)

En outre, le saint évêque d’Hippone parle de la mission confiée à Pierre de paître le troupeau, et la rattache explicitement au « chaire de Pierre », c’est-à-dire le siège romain :

« Je passe d’abord sous silence cette sagesse sincère et véritable dont la connaissance n’est possible en cette vie qu’à un petit nombre d’hommes spirituels ; les autres n’en connaissent que les éléments les plus simples, mais du moins cette connaissance n’est accompagnée d’aucune hésitation ; ce qui leur donne cette heureuse assurance, ce n’est pas, la vivacité de leur compréhension, mais la simplicité de leur foi. Je garderai donc le silence sur cette sagesse, dont vous niez la présence dans l’Eglise catholique; j’y consens d’autant plus volontiers que je trouve assez d’autres garanties qui me retiennent dans son sein. Ce qui me frappe d’abord, c’est le consentement unanime des nations et des peuples; c’est le spectacle d’une autorité engendrée par les miracles, nourrie par l’espérance, augmentée par la charité, affermie par la durée. Ce qui, me frappe encore, c’est la chaire de Pierre à qui le Seigneur, après la résurrection, a confié le soin de paître ses brebis, c’est aussi cette imposante succession du sacerdoce, couronnée par l’épiscopat qui découle directement du pontificat lui-même.» (Réfutation de l’épître manichéenne appelée Fondamentale, IV)

Par ailleurs Saint Augustin compare cette faute de saint Pierre à la faute de saint Cyprien dans la querelle des rebaptisants sans remettre en cause la foi et la primauté de Pierre, et en déduit qu’on ne doit pas s’offusquer de la critique contre saint Cyprien. Pierre étant le premier de apôtres pouvant pécher, à plus forte raison saint Cyprien :

« Or, si saint Pierre, contre la règle de la vérité formulée depuis par l’Eglise, a pu vouloir contraindre les Gentils à judaïser, comment ne pas admettre que Cyprien, contrairement à la règle de la vérité, formulée plus tard par l’Eglise, n’a pu vouloir contraindre les hérétiques et les schismatiques à recevoir une seconde fois le baptême ? Je pense que l’évêque Cyprien ne doit pas être blessé de se voir comparé à l’apôtre saint Pierre, quant à ce qui regarde la couronne du martyre. Bien plutôt je dois craindre de paraître injurieux à l’égard de saint Pierre. En effet, qui pourrait ignorer que cette primauté de l’apostolat conférait à saint Pierre une prééminence réelle sur tout l’épiscopat ? […]

Quand donc nous voyons saint Pierre repris par saint Paul son inférieur, et couronné de la palme du martyre sans avoir porté aucune atteinte aux liens de la paix et de l’unité.  » (Du baptême, contre les donatistes, II, 1, 2)

Il dit par ailleurs dans ses 9ème et 19ème lettres adressées au dit saint Jérôme qu’il ne s’agit de rien d’autre que d’un peu d’imprudence, d’une trop grande bonté, d’un excès de réserve chez le Prince des Apôtres.

Saint Léon le Grand (440-461)

Nous montrons comment saint Léon le Grand explique les prérogatives données par le Christ à saint Pierre et comment il les applique dans la suite des siècles à l’évêque de Rome dans notre article :

L’autorité du successeur de Pierre d’après saint Léon le Grand

Saint Gélase (mort en 496)

« Pour quelle raison ou conséquence doit-elle être défendue par d’autres sièges, si l’ancienne et antique révérence n’est pas accordée au premier siège du bienheureux Pierre, par lequel la dignité de tous les prêtres a toujours été renforcée et établie ? Comme ceux qui se souviennent de la sentence du Seigneur : « Et moi je te dis que tu es Pierre, et sur cette pierre je bâtirai mon Église, et les portes de l’enfer ne prévaudront point contre elle. Et je te donnerai les clefs du royaume des cieux : et tout ce que tu lieras sur la terre sera lié dans les cieux, et tout ce que tu délieras sur la terre sera délié dans les cieux » [Matthieu XVI, 1819]. Et encore au même : « Voici que j’ai prié pour toi, afin que ta foi ne défaille point ; et toi, quand tu seras converti, affermis tes frères » [Luc XXII, 32], et ceci : « si tu m’aimes, pais mes agneaux » [Jean XXI, 15-17]. Pourquoi, alors, le discours du Seigneur est-il si fréquent à Pierre ? le reste des saints et bienheureux apôtres n’était-il pas ceint de la même vertu ? Qui oserait affirmer cela ? « Cependant un seul est choisi afin d’écarter le risque d’un schisme en établissant un chef » [Saint Jérôme, Contre Jovinien, livre I, chapitre 26, PL, XXIII, 258-259], et l’unique charpente du corps de Christ fut purifiée, qui se réunirait en une seule tête dans la plus glorieuse société d’amour ; et il y avait une Église à laquelle on croyait fidèlement, et une maison d’un Seigneur et d’un Rédempteur, dans laquelle nous étions nourris d’un seul pain et d’une seule coupe [I Corinthiens X]. C’est pourquoi, comme je l’ai dit, nos ancêtres, ces révérends maîtres de l’Église, et ces plus brillantes lumières du peuple chrétien, qui, après les mérites de leurs vertus, même jusqu’à la plus glorieuse des confessions, ont déployé des palmes et des couronnes scintillantes de martyre, envoyèrent à ce siège où siégeait Pierre [Rome], le chef des apôtres, des messages de solidarité, exigeant la solidité de leur fermeté, assumant les principes de leur sacerdoce, remplis de l’amour du Christ. […] Certes, il y avait douze apôtres, de mérites égaux et de dignité égale. Et tous brillaient de manière égale dans la lumière spirituelle, mais Christ souhaitait qu’il n’y ait qu’un seul prince parmi eux, et par une admirable disposition, il le dirigea vers Rome, maîtresse des nations, Il dirigerait Pierre dans la ville principale ou la première. Et là, comme  par la sublime puissance de sa doctrine, et il eut l’honneur de répandre glorieusement son sang. C’est là qu’il repose pour toujours, et qu’il assure à ce Siège béni par lui de n’être jamais vaincu par les portes de l’enfer, conformément aux promesses du Seigneur [Matthieu XVI, 18] » (Lettre XIV De responsione ad Graecos, PL tome 59, colonne 90)

Jean II (470-533)

« Jean, Évêque de Rome, à notre très-illustre et très-clément fils Auguste Justinien.

Outre les éloges mérités qu’on peut donner à votre sagesse et à votre douceur, le plus chrétien des princes, vous êtes distingué encore comme un astre radieux, par l’amour de la foi et de la charité ; et instruit, sur ce qui concerne la discipline ecclésiastique, vous avez conservé la doctrine de la prééminence du siège de Rome ; vous lui avez soumis toutes choses, et vous avez ramené l’unité dans l’Eglise. Le Seigneur a dit au premier de nos prédécesseurs, qui est aussi le premier des apôtres : « Gardez mes brebis » [Jean XXI, 15-17] ; siège que les institutions dès princes, les maximes des pères, et le témoignage de votre piété , déclarent le chef de toutes les églises. » (Pape Jean II, Lettre à l’Empereur Justinien ; PL, tome 66, colonne 17Code Justinien, Livre I, titre premier, point n°8)

Pélage II (520-590)

« Vous savez que le Seigneur dit dans l’Evangile : ‘Simon, Simon, voici que Satan vous a réclamés pour vous cribler comme le froment ; mais j’ai prié pour toi, afin que ta foi ne défaille point ; et toi, quand tu seras converti, affermis tes frères !’ [Luc XXII, 31-32]. Considérez que la Vérité n’a pas pu mentir, et que la foi de Pierre ne pourra pas être ébranlée ou changée pour toujours. Car, bien que le diable ait voulu tamiser tous les disciples, le Seigneur témoigne Lui-même qu’Il a sollicité Pierre seul, et a souhaité que les autres soient confirmés par lui; et à Pierre il confia aussi la charge de ‘paître les agneaux’ [Jean XXI, 15] ; et à lui aussi le Seigneur remis les ‘Clés du Royaume des Cieux’ [Matthieu XVI, 19], et sur lui Il a promis de ‘bâtir Son Eglise’ [Matthieu XVI, 18] ; et Il témoigna que ‘les portes de l’enfer ne prévaudront pas contre elle’ [Matthieu XVI, 18] » (Lettre Quod ad dilectionem adressée aux évêques schismatiques d’Istrie [585])

Saint Grégoire le Grand (vers 540-604)

« Il est clair pour tous ceux qui connaissent l’Évangile qu’à la parole du Seigneur la charge de toute l’Église a été confiée à l’apôtre saint Pierre, prince de tous les apôtres ; c’est à celui-ci qu’il est dit : « Pierre, m’aimes-tu ? ; Pais mes brebis » [Jean XXI, 15-17]. C’est à lui qu’il est dit : « Voici que Satan a cherché à vous éprouver tous comme on passe le blé au crible, et moi j’ai prié pour toi afin que ta foi ne défaille pas, et lorsque tu te seras converti, confirme tes frères » [Luc XXII, 28-32]. C’est à lui qu’il est dit : « Tu es Pierre et sur cette pierre je bâtirai mon Église et les portes de l’enfer ne prévaudront pas contre elle » [Matthieu XVI, 18] ; « je te donnerai les clefs du Royaume des cieux ; tout ce que tu auras lié sur terre sera lié dans les cieux, tout ce que tu auras délié sur terre sera délié dans les cieux » [Matthieu XVI, 19].

Voici qu’il a reçu les clefs du Royaume céleste, voici qu’on lui donne le pouvoir de lier et de délier, voici qu’on lui confie le soin de toute l’Église et le pouvoir suprême sur celle-ci, le Christ confie à saint Pierre la charge de toute l’Eglise et le pouvoir suprême sur celle-ci, et pourtant il ne l’appelle pas apôtre universel. » (Lettre à l’empereur Maurice, Registre des lettres, Livre V, Lettre 20 (alias Livre 4, Lettre 32), PL, 77/745 et 746)

Saint Bède le Vénérable (672/673-735)

« Le Christ vit la simplicité de son cœur, l’élévation de son âme et ces qualités lui méritèrent d’être placé à la tête de toute l’Église. » (Dans son Commentaire sur ce passage de l’Évangile de saint Jean : « Et Jésus l’ayant regardé » (Jn, 1 / 42.), Homiliarum liber secundus, homélie 23 pour la fête de saint André apôtre – PL, 94 / 259)

Saint Jean Damascène (vers 676-749)

Saint Jean Damascène enseigne que Saint Pierre avait une autorité unique et qu’elle impliquait une juridiction sur toute l’Eglise. Se référant à la Transfiguration, il déclare :

« Mais pourquoi [Jésus] a-t-Il emmené avec lui Pierre, Jacques et Jean ? Pierre, parce qu’il voulait lui montrer que le témoignage qu’il [Pierre] avait vraiment rendu, était maintenant confirmé par le témoignage du Père, et rendre crédible sa propre déclaration [c’est-à-dire Jésus] que le Père céleste avait révélé cela à lui [c’est-à-dire Pierre], et parce qu’en tant que président, il recevait aussi les rames de toute l’Église. » (Homélie de la transfiguration, n°9 ; PG, 96, 560)

Ici Saint Jean Damascène se réfère à Saint Pierre comme le président qui recevait les rames ou le gouvernail ou la direction de toute l’Eglise. En grec, les termes utilisés sont « πάσης τής έκκλησίας» [pásis tís ékklisías] qui veut dire « de toute l’Église » ou « l’ensemble de l’Église ». Selon Saint Jean de Damascène, saint Pierre dirige toute l’Église, ce qui indique qu’il possédait la juridiction ou l’autorité pour diriger toute l’Église. Saint Jean Damascène se réfère à plusieurs reprises à Saint Pierre comme « πρόεδρος (πρόεδρον)» [próedros en utilisant la forme accusative próedron] ce qui signifie « président » ou « celui qui est assis au premier siège ». Ce terme signifie qu’il a l’autorité et la juridiction sur toute l’Église. Nous retrouvons également ce terme chez Saint Grégoire de Nazianze que nous y reviendrons un peu plus tard. Examinons maintenant un autre passage de Saint Jean Damascène :

« Le Maître vous a nommé [Pierre] comme directeur non pas des tabernacles, mais de l’Église dans le monde entier. Vos disciples, vos brebis, le Bon Chef Berger a mis entre vos mains…» (Homélie de la transfiguration, n°16 ; PG, 96, 569)

Selon Saint Jean Damascène, Saint Pierre est le directeur ou l’organisateur de l’Eglise dans le monde entier. Permettez-moi de répéter ceci, « de l’Église dans le monde entier ». En grec, nous trouvons les termes « Εκκλησίας παγκοσμίου» [Ekklisías pankosmíou] qui signifie « de l’Église dans le monde entier » ou simplement « de l’Église universelle ». Saint Jean dit également que le Bon Berger a placé ses brebis entre les mains de Saint Pierre, ce qui indique encore une fois que Saint Pierre a la juridiction sur toutes les brebis. À la lumière de ces faits et de la preuve biblique elle-même (Matthieu XVI, 18-19 et Jean XXI, 15-17).

Dans le passage suivant qui concerne la Transfiguration, Saint Jean Damascène se réfère à Saint Pierre comme le chef suprême de la nouvelle alliance et il le compare à Moïse le chef de l’ancienne alliance. Citation :

« Aujourd’hui, le chef suprême de la Nouvelle Alliance – celui qui a proclamé le Christ Fils de Dieu le plus clairement lorsqu’il a dit : « Tu es le Christ, le Fils du Dieu vivant » – voit le chef de l’Ancienne Alliance debout à côté du législateur des deux… » (Homélie de la transfiguration, n°2 ; PG, 96, 548)

Nous savons que Moïse avait autorité de Dieu sur tout le peuple d’Israël (cf. Nombres XII et XVI, ce qui est arrivé à ceux qui se sont rebellés cette autorité). Saint Pierre a une autorité similaire à celle du Christ sur la Nouvelle Alliance de Dieu selon le père grec Saint Jean Damascène. Le mot traduit pour ici « chef suprême » est « κορvφαιότατος» [korufaiótatos] il est important de considérer ce mot « korufaiótatos » est la forme superlative du mot « κορυφιος» [korufios] qui signifie le chef ou chef suprême ou leader. Il vient du mot « κορυφη » [Korufi] qui signifie le point le plus élevé du crâne ou le sommet de la tête. Quand vous prenez par exemple l’adjectif « rapide » la forme comparative de cet adjectif serait « plus rapide que » tandis que la forme superlative de mot « rapide » exprime le plus haut degré ou grade de cet adjectif qui serait « le plus rapide ». Comme par exemple avec le mot « grand » qui serait dans sa forme comparative « plus grand que » ou dans sa forme superlative « le plus grand ». Saint Jean Damascène utilise à propos de Saint Pierre « korufaiótatos » comme la forme superlative de « korufios » qui signifie, comme nous l’avons dit, chef ou chef suprême ou leader. Saint Jean dit que Saint Pierre est le chef ou chef le plus suprême ou le plus élevé de l’Église. Ce qui indique, bien qu’il y ait plusieurs chefs dans l’Église, à savoir les autres apôtres ou évêques, il y a UN chef suprême : Saint Pierre. Le Christ-Jésus dit être le chef invisible de l’Église alors que son vicaire (Saint Pierre) était le chef visible après la résurrection. Les véritables successeurs de saint Pierre comme évêques de Rome, ainsi que comme vrais papes, assument la même fonction.

Dans le prochain passage, Saint Jean de Damascène parle de Saint Pierre comme recevant les clés d’une manière unique. Il dit, citation :

« Christ « t’a nommé détenteur des clés du royaume des cieux, qui t’a conféré le lien et le déliement des moyens de correction. » (Homélie de la transfiguration, n°6 ; PG, 96, 556)

Saint Jean Damascène distingue saint Pierre et se réfère à lui d’une manière unique comme le détenteur des clés du royaume des cieux. Tous les apôtres sont promis au pouvoir de lier et de délier dans Matthieu XVIII, 18 mais seul Saint Pierre a été promis les clés dans Matthieu XVI, 18-19. Pourquoi ces deux passages considérés ensemble prouvent davantage l’enseignement catholique sur la Papauté ? Matthieu XVI, 19 considéré en conjonction avec Mathieu XVIII, 18 démontre en outre que Saint Pierre est le premier à recevoir juridiction sur tous les apôtres et toute l’Église.

Dans le passage suivant, saint Jean de Damascène se réfère à nouveau à Saint Pierre comme « próedros » ou président de l’Église en utilisant la forme accusative « próedron ». Citation :

« [Saint Pierre] celui qu’Il [Jésus], dans sa propre prescience, l’avait préordonné pour être un digne président [πρόεδρον] de l’Église. » (Homélie de la transfiguration, n°6 ; PG, 96, 553)

Comme nous l’avons vu « póedros », qui signifie « président » ou « celui qui est assis au premier rang », était appliqué à la position que les évêques occupaient au sein de leur propre diocèse en tant que « πρόεδροι » [proedroi] ou président. Alors que Saint Jean Damascène et d’autres pères de l’Eglise identifient Saint Pierre comme « póedros » de toute l’Église, cela signifie qu’il avait la juridiction sur toute l’Église comme tout évêque qui a compétence sur son propre diocèse. Saint Grégoire de Nazianze (329-390) le montre en déclarant :

« La nature ne nous a pas donné deux soleils. Mais nous avons deux Rome, deux lumières pour éclairer le monde entier, l’ancien pouvoir et le nouveau. » (Poème 11 sur sa vie : Carmen de Vita sua, vers 360 dans PG, 37/1067-1068)

On pourrait croire que ce texte met à pied d’égalité Constantinople et Rome, c’est- à-dire la nouvelle Rome et l’ancienne. Mais lisons ce qui suit :

« Pour ce qui est de la foi, Rome court déjà depuis longtemps et encore aujourd’hui dans la bonne direction [δέουσα], elle délivre l’Occident tout entier en lui donnant la doctrine du salut, et il est bien juste que l’Église qui est à la tête [ou « présidente » : πρόεδρον] de toutes les autres ait le soin d’établir partout la concorde divine. Quant à Constantinople, la nouvelle Rome, elle marchait jusqu’ici droitement […] et il n’en va plus de même aujourd’hui. »

Saint Grégoire de Nazianze montre que le Siège de Rome était « póedros » ou « président » sur tous les autres évêques et toutes les Églises, ce qui signifie bien sûr la juridiction universelle qui est la position catholique sur la Papauté.

Un autre passage de Saint Jean Damascène dit:

« Il [Jésus] l’a acquise [l’Église] par son propre sang, mais il vous la confie [Pierre] comme un serviteur très fidèle. » (Homélie de la transfiguration, n°6 ; PG, 96, 556)

Saint Jean Damascène utilise le mot « έγχειρίζει» [éncheirízei] qui signifie « confier » c’est une forme conjuguée du verbe « εγχειρίζω» [encheirízo] ce verbe est lié au verbe « χείρ» [cheír] qui signifie littéralement « main ».

« Encheirízo » signifie « Je mets entre les mains ou je remets ». Il était utilisé pour signifier donner à quelqu’un l’autorité ou le contrôle sur quelque chose.

Selon Saint Jean de Damascène, Jésus-Christ met l’Église entre les mains de Saint Pierre, Il la lui remet donc à Saint Pierre qui a juridiction sur l’ensemble de l’Église.

Saint Théodore Studite (759-826)

« Au très saint et souverain Père des Pères, à mon Seigneur Léon, Pape apostolique, Théodore, très humble prêtre et higoumène de Stoudion. Puisque c’est à Pierre le grand que le Christ notre Dieu, après lui avoir donné les clés du royaume des cieux, a conféré la dignité de chef du troupeau, c’est à Pierre, c’est-à-dire à son successeur, qu’il faut soumettre toutes les nouveautés hérétiques introduites dans l’Église universelle par ceux qui s’écartent de la vérité. » (Lettres, livre Ier, 33 ; P. G., t. XCIX, col. 1017 Β : Έπειδήπερ Πέτρω τώ μεγάλω δέδωκε Χρίστος ό Θεός μετά τας κλείς της βασιλείας τών ουρανών και το της ποιμνιαρχίας αξίωμα’ προς Πέτρον ήτοι τον αύτοΰ διάδοχον ότιοΰν καινοτομούμενον έν τη Καθολίκί) ‘Εκκλησία παρά τών άποσφαλλομένων της αληθείας άναγκαϊον άναφέρεσθαι)

Saint Théodore Studite, né à Constantinople en 759, mort en exil au monastère bithynien de Saint-Tryphon, dans la presqu’île d’Acritas ou de Touzla, le 11 novembre 826, a précédé d’une génération seulement Photius, puisque ce trop célèbre fauteur du schisme oriental avait vu le jour en 820. Il y a donc un intérêt spécial à connaître ce que pensait de la primauté du Pape cet illustre moine du couvent constantinopolitain de Stoudion, qui est, on l’a écrit très justement, « une des figures les plus attachantes de la Byzance impériale et la gloire de l’Église d’Orient au IXe siècle. On a pu dire de lui qu’il fut l’un des derniers catholiques de Constantinople, le dernier peut-être des écrivains ecclésiastiques grecs qui n’aient point connu l’asservissement aux empereurs; que son éloquence atteint parfois à l’éloquence de saint Jean Chrysostome et de Démosthène lui-même »

Aussi sa vision de la Papauté nous est exposée dans l’article La primauté de saint Pierre et du Pape d’après saint Théodore Studite (759-826) par le Père Sévérien SALAVILLE (dans Revue d’Etudes Byzantines, 1914, Numéro 104,  pp. 23-42). Voici le plan de cet article :

I. – La primauté de saint Pierre.

II. – La primauté du Pape.

1° L’épiscopat de saint Pierre à Rome.

2° La primauté du Pape est de droit divin.

3° Universalité de juridiction sur le monde entier.

4° Le pouvoir du Pape est sans appel.

5° Droit de convocation et d’approbation des conciles.

6° L’infaillibilité du Pape.

7° La Papauté centre de l’unité de la foi et de la communion.

Il faut noter que les Orthodoxes, célébrant ce saint le 11 novembre, le chantent comme :

« L’intrépide défenseur de la vérité, la colonne et le soutien de la foi orthodoxe, le guide inspiré de l’orthodoxie, le docteur de la piété, le flambeau de l’univers qui, par ses enseignements, a éclairé tous les fidèles, la lyre du Saint-Esprit, etc. » (Τής αληθείας σφόδρον συνήγογον, στύλον, έδραί’ωμα ορθοδόξου πίστεως. — ‘Ορθοδοξίας οδηγέ, Οεόπνευστε, εύσεβείας διδάσκαλε, της οΐκουμε’νης ό φωστήρ, ταΐς διδαχαΐς σου πάντας έφώτισας, λύροΕ του Πνεύματος. Voir dans les Menées l’office des Vêpres et de l’aurore, au 11 novembre)

Ils épuisent en son honneur la magnificence des titres et des épithètes. Ou ce langage signifie quelque chose, ou ce n’est qu’une phraséologie rhétorique sans substance. Pour un esprit logique il n’est point d’autre alternative. Par les saints qu’elle célèbre, la liturgie grecque est la condamnation la plus expresse qui se puisse imaginer du schisme oriental. Quand on chante saint Jean Chrysostome, saint Léon de Rome, saint Grégoire le Grand, saint Maxime le Confesseur, saint Jean Damascene, saint Théodore Studite et tant d’autres, si l’on connaît leur doctrine et si l’on est conséquent, on ne peut qu’être catholique.

Théodore Abu Qurrah (vers 750-vers 820)

Théodore Abu Qurrah (en arabe ثاوذورس أبي قرة, Thaoudourous Abou Qourra) (v. 750-v. 820), évêque de Harran, est un théologien de langue arabe et de culture gréco-romaine qui vécut durant la première période de l’islam. Il est connu, dans les publications anciennes, sous le nom d’Aboucara ou Abou Kurra.

« Il faut noter que les Apôtres avaient pour chef saint Pierre à qui le Christ avait dit : « Tu es Pierre, et sur cette pierre je bâtirai mon Église, et les portes de l’enfer ne triompheront point d’elle » (Matthieu XVI, 18). ; à qui il dit aussi trois fois, après sa résurrection, près la mer de Tibériade : « Simon, m’aimes-tu ? (Si tu m’aimes) Pais mes agneaux, mes béliers et mes brebis » (Jean XXI, 15-17). Simon, m’aimes-tu ? (Si tu m’aimes) Pais mes agneaux, mes béliers et mes brebis : « Simon, Satan a demandé de vous cribler comme on crible le blé, et j’ai prié pour toi afin que tu ne perdes pas ta foi ; mais, à l’instant, tourne-toi vers tes frères et affermis-les. » (Luc XXII, 32).

Vous voyez bien que saint Pierre est le fondement de l’Église propre au troupeau (des fidèles), et celui qui a sa foi ne la perdra jamais ; c’est lui aussi qui est chargé de se tourner vers ses frères et de les affermir.

Les paroles du Seigneur : « J’ai prié pour toi afin que tu ne perdes pas ta foi ; mais tourne-toi à l’instant vers tes frères et affermis-les » (Luc XXII, 32), ne désignent pas la personne de Pierre ni les Apôtres eux-mêmes. Le Christ a voulu désigner par ces mots ceux qui tiendront la place de saint Pierre à Rome et les places des Apôtres. De même quand il dit aux Apôtres : « Je serai avec vous tous les jours jusqu’à la fin des siècles »,(Matthieu XXVIII, 20) il n’a pas voulu désigner les personnes des Apôtres seuls, mais encore ceux qui tiennent leurs places et tout leur troupeau. Ainsi par ces mots qu’il adressa à saint Pierre : « Tourne-toi à l’instant et affermis tes frères, et que ta foi ne se perde pas », il a voulu désigner ses successeurs ; par la raison que saint Pierre seul parmi les Apôtres a perdu sa foi et nié le Christ, le Christ l’avait exprès abandonné pour nous montrer que ce n’est pas sa personne qu’il a voulu désigner, et nous n’avons vu aucun Apôtre tomber afin que saint Pierre l’affermisse.

Dire que le Christ a voulu désigner saint Pierre et les Apôtres en personne, ce serait priver l’Église de ce qui doit l’affermir après la mort de saint Pierre. Comment cela pourrait-il être ? En voyant, après la mort des Apôtres, Satan passer l’Église au crible, il est évident que ce ne sont pas eux que le Christ a voulu désigner par ces mots. Nous savons tous, en effet, que c’est après la mort des Apôtres que les hérésiarques ont agité l’Église, savoir : Paul de Samosate, Arius, Macédonius, Eunomius, Sabellius, Apollinaire, Origène et les autres. Si ces mots du texte sacré ne désignent que les personnes de saint Pierre et des Apôtres, l’Église aurait donc été privée de consolation et n’aurait eu personne qui la sauvât de ces hérésiarques et de leurs doctrines qui sont les portes de l’enfer dont le Christ a dit qu’elles ne triompheront jamais de l’Église. Il est donc de toute évidence que ces mots désignent les successeurs de saint Pierre, qui ne cessent en effet d’affermir leurs frères et ne cesseront jamais jusqu’à la fin des siècles.

Vous savez bien que lorsque Arius se révolta, une assemblée fut réunie contre lui par l’ordre de l’évêque de Rome. Le saint Concile l’a condamné et a fait cesser son hérésie ; et l’Église a accepté la décision de ce concile et a repoussé Arius comme l’Église d’Antioche avait accepté la lettre des Apôtres et avait rejeté ces sectateurs qui lui enseignaient la circoncision et la pratique de la loi. Ainsi lorsque Macédonius se révolta au sujet du Saint-Esprit, une assemblée fut réunie contre lui à Constantinople par l’ordre de l’évêque de Rome ; ce concile rejeta l’hérésiarque et l’Église accepta sa décision comme elle avait accepté celle du premier. Elle excommunia Macédonius comme elle avait déjà excommunié Arius. […]

Lorsque Nestorius se révolta en disant du Christ ce qu’il en a dit, l’Église rejeta sa doctrine et la porta, selon sa coutume, au saint concile, qui fut réuni à Éphèse par ordre de l’évêque de Rome. Le saint concile l’excommunia et fit cesser son hérésie. La sainte Église accepta ce concile et excommunia Nestorius en repoussant sa doctrine, persuadée qu’elle n’avait pas le droit de prendre part dans la décision de ce concile, mais qu’elle avait l’ordre du Saint-Esprit de s’y soumettre, comme nous l’avons déjà démontré. […]

Lorsqu’Eutychès et Dioscore se révoltèrent en disant du Christ ce qu’ils en avaient dit, l’Église a repoussé leur hérésie et les Saints Pères se sont levés contre eux. Mais l’Église n’a pas accepté leur doctrine ni celle de ceux qui les contredisaient, elle les a fait traduire au jugement du saint concile, selon sa coutume. Le quatrième concile a été réuni alors à Chalcédoine par l’ordre de l’évêque de Rome ; il les a excommuniés et a fait cesser leur hérésie. L’Église accepta alors la décision de ce concile, comme elle avait accepté celles des trois premiers conciles ; elle excommunia Eutychès et Dioscore et rejeta leur hérésie, sachant bien qu’elle n’a pas le droit d’intervenir avec ce concile et persuadée que sa décision était celle du Saint-Esprit. […]

Mais, nous, orthodoxes et enfants de la sainte Église, nous rendons gloire et action de grâces au Christ, notre Dieu, qui nous a accordé la bonne volonté et l’obéissance aux saints conciles que le Saint-Esprit a fait parler. Nous sommes dans sa maison et dans le bercail de ses troupeaux. Par sa protection, nous sommes sauvés de Satan qui, comme un loup dévorant, rôde autour de nos âmes pour surprendre celui qui se hasarde à sortir de l’Église et en faire sa proie. Nous supplions notre Seigneur et notre Dieu Jésus-Christ de nous affermir pour toujours sur le roc de son Église sainte et de nous faire boire la liqueur de sa douce doctrine. Nous serons ainsi enivrés de son amour qui remplit nos âmes et nos cœurs de joie et de bonheur en nous portant à lui obéir par l’observation de ses commandements, pour vivre éternellement et hériter son royaume céleste préparé pour tout ce qui a été édifié sur le fondement de saint Pierre par le Saint-Esprit. Ô Esprit-Saint, faites-nous connaître le Christ, le Fils éternel de Dieu, qui s’est incarné de la Vierge Marie par le Saint-Esprit pour notre salut. À lui soit la gloire, la puissance, la majesté et l’adoration, avec le Père et le Saint-Esprit, maintenant et toujours, dans les siècles des siècles. » (Démonstration de la sainte Loi de Moïse et des Prophètes qui ont annoncé le Messie. — Du saint Évangile prêché aux Gentils par les Apôtres du Christ né de la Vierge Marie. — De l’orthodoxie attribuée par tous les hommes aux Chalcédoniens. — Réfutation des doctrines de toutes les sectes qui se nomment chrétiennes par le magister-philosophe, notre saint P. Théodore, évêque de Haran, traduit par le Père Constantin BACHA, publiée sous le titre de Un traité des oeuvres arabes de Théodore Abou-Kurra; trouvable en anglais in : Theodore Abu Qurrah, Librairy of the Christian East, volume 1, Brigham Young University Press, Provo, 2005, pp. 68-69)

B) L’interprétation d’un évêque du IIè millénaire reconnu comme saint par l’église orthodoxe mais pas par l’Eglise catholique

Théophylacte d’Ohrid (1030-1108)

«  Ayant achevé le repas, le Christ confie à saint Pierre, et non pas à un autre, la responsabilité de paître les brebis dans le monde entier : « Lors donc qu’ils eurent mangé, Jésus dit à Simon-Pierre :’Simon, fils de Jean, m’aimes-tu plus que ceux-ci ?’ » […] En adressant à saint Pierre cette parole : Suis-moi, le Seigneur établit en sa faveur la charge de gouverner tous les fidèles. […] Autrement dit, jusqu’au moment où je voudrai assister Jean dans sa prédication; car pour ce qui est de toi, c’est dès maintenant que je suis à tes côtés dans l’exercice du pouvoir pontifical sur l’univers entier, et en cela suis-moi » (Commentaire sur l’Evangile de saint Jean, 21/15 dans PG, 124/309 ; 313 ; 316)

« « Et quand tu te seras converti, confirme tes frères. » Le sens de cette expression est fort clair : je te considère comme le chef de mes disciples et c’est pourquoi lorsque tu auras pleuré après m’avoir renié et te seras repenti, confirme tous les autres. Car cela te revient, puisque, après moi, c’est toi qui est la pierre et le fondement de l’Eglise. […] Il renia le Christ alors qu’il était son apôtre et par sa pénitence il obtint de nouveau la prérogative de gouverner le monde. » (Commentaire sur l’Evangile de saint Luc, 22/32 dans PG, 123/1073)

Ce témoignage est d’autant plus significatif qu’il est fait par un évêque de l’église orthodoxe, postérieurement au schisme, et considéré comme un saint par l’église orthodoxe.

C) Le IIIè concile de Constantinople : une preuve définitive pour les Orthodoxes, gallicans, vieux-catholiques et tous ceux qui reconnaissent l’autorité des conciles sans reconnaître celle des Papes

A l’occasion du IIIè concile de Constantinople (680-681), le Pape saint Agathon envoya deux lettres aux empereurs. Nous lisons, entre autres, dans la première lettre :

« C’est là la tradition des apôtres et de l’Evangile, que conserve l’Eglise apostolique du Christ, qui est la mère spirituelle de votre empire très heureux. Voilà ce que professe en toute vérité et en toute pureté la religion chrétienne ; ce n’est pas l’artifice des hommes qui l’a inventé, mais c’est le Saint-Esprit qui l’a enseigné grâce à la prédication des tout premiers apôtres. […] C’est pourquoi, je vous en supplie avec un cœur contrit et en versant des larmes, humblement prosterné en esprit : daigne secourir la doctrine apostolique que l’apôtre saint Pierre nous a transmise, pour qu’elle ne soit pas cachée sous le boisseau mais qu’elle soit prêchée dans le monde entier, sur un ton plus retentissant que la trompette. En effet, saint Pierre a professé la vraie foi qui lui fut révélée par le Père céleste et cela lui valut d’être proclamé bienheureux par Notre-Seigneur. Et il se vit confier à trois reprises par le Rédempteur la charge de paître les brebis spirituelles de l’Eglise [Jean XXI, 15-17]. C’est grâce à sa protection que cette Eglise apostolique n’a jamais dévié de la voie de la vérité, et n’est jamais tombée dans l’erreur, de quelque côté que ce fût. C’est son autorité, celle du prince des apôtres, que toute l’Eglise catholique et tous les conciles ont reconnue fidèlement et ont toujours suivie en tout, et tous les saints Père en ont embrassé et soutenu avec zèle la doctrine comme venant des apôtres, doctrine qui a fait la gloire de tous les docteurs qui ont brillé dans l’Eglise, tandis qu’elle a d’un autre côté fait le tourment des hérétiques, qui n’ont cessé de la décrier et de la calomnier. […] Voilà la véritable règle de la foi, que notre mère spirituelle a toujours conservé et défendue dans le succès comme dans l’adversité. Par la grâce du Dieu tout puissant, cette Eglise ne tombera jamais dans l’erreur et ne s’écartera jamais du droit chemin de la tradition apostolique. Elle n’a jamais succombé et ne s’est jamais trouvée corrompue par les nouveautés des hérétiques. Au contraire, dès les origines de la foi chrétienne, elle a reçu le soutien de ses fondateurs, les princes des apôtres du Christ, et elle demeure sans tache jusqu’à la fin, conformément à la promesse de Notre-Seigneur et Sauveur, et à la parole qu’il adressa à saint dans les saints Evangiles au prince de ses disciples : « Pierre, Pierre, voilà que Satan vous a recherché pour vous cribler comme on crible le froment ; mais j’ai prié pour vous, afin que votre foi ne défaille point : lors donc que vous vous serez converti, ayez soin d’affermir vos frères. » [Luc XXII, 32]. Que Votre Clémence considère donc cet avertissement de Notre-Seigneur et Sauveur, l’auteur de notre foi : en promettant à saint Pierre que sa foi ne défaillirait pas, il l’engagea à confirmer ses frères. Tout le monde sait bien que les pontifes du siège apostolique, ceux qui ont précédé mon humble personne, ont réalisé cette tache sans douter de cette parole. […] Aucun autre motif plus approprié ne saurait recommander à la divine majesté votre force absolument invincible : combattez ceux qui se sont écartés de la règle de la vérité, faites connaître et proclamez partout l’intégrité de notre foi évangélique et apostolique. » (Lettre I Consideranti mihi aux empereurs, 27 mars 680, PL, 87/1168-1169 et 1212 ; LABBE, Sacrosancta concilia, t. VI, col. 635 et 636 et MANSI, Sacrorum Conciliorum nova et amplissima collectio, t. XI, col. 234 et suivantes)

De plus, nous lisons, entre autres, dans la première lettre :

« Que Votre Clémence considère donc cet avertissement de Notre-Seigneur et Sauveur, l’auteur de notre foi : en promettant à saint Pierre que sa foi ne défaillirait pas, il l’engagea à confirmer ses frères. Tout le monde sait bien que les pontifes du siège apostolique, ceux qui ont précédé mon humble personne, ont réalisé cette tache sans douter de cette parole. […] Aucun autre motif plus approprié ne saurait recommander à la divine majesté votre force absolument invincible : combattez ceux qui se sont écartés de la règle de la vérité, faites connaître et proclamez partout l’intégrité de notre foi évangélique et apostolique. » (Lettre I Consideranti mihi aux empereurs, 27 mars 680, PL, 87/1168-1169 et 1212 ; LABBE, Sacrosancta concilia, t. VI, col. 635 et 636 et MANSI, Sacrorum Conciliorum nova et amplissima collectio, t. XI, col. 234 et suivantes)

Puis :

« Saint Pierre a reçu du Rédempteur lui-même par une triple recommandation qui lui en a été faite, la charge de paître les brebis spirituelles qui composent son Eglise ; et c’est grâce à l’appui qu’il continue de lui prêter, que cette Eglise apostolique n’a jamais déviée par une erreur quelconque de la voie de la vérité ; aussi, de tout temps, toute l’Eglise catholique et les conciles généraux ont-ils fidèlement adhéré à son autorité comme à celle du prince de tous les apôtres, s’attachant à la suivre en tout, et tous les saints Père en ont embrassé et soutenu avec zèle la doctrine comme venant des apôtres […] Que votre auguste clémence veuille donc bien considérer que le maître et le Sauveur de tous, qui est l’auteur de la foi, et qui a promis que la foi de Pierre ne défaillira jamais, l’a averti d’affermir ses frères : charge dont se sont acquittés en toute circonstance avec courage, comme tout le monde le sait, les pontifes apostoliques mes glorieux prédécesseurs ; et quoique bien inférieur à leurs mérites je veux, puisque la grâce divine m’a appelé à leur succéder, m’acquitter à leur exemple de ce même ministère. » (Lettre I Consideranti mihi aux empereurs, 27 mars 680, PL, 87/1168-1169 ; LABBE, Sacrosancta concilia, t. VI, col. 635 et 636 et MANSI, Sacrorum Conciliorum nova et amplissima collectio, t. XI, col. 234 et suivants)

Et dans la seconde, signée des cent-vingt-cinq Évêques d’un concile tenu à Rome :

« Nous croyons que Dieu fera à votre trône, qu’il a élevé lui-même, la faveur si rare, et qui est le privilège du très-petit nombre, d’être le moyen dont il se servira pour faire briller aux yeux de tous la lumière de la foi catholique et apostolique, qui, ayant pour principe la source même de la vraie lumière dont elle est comme le rayon, nous a été transmise par le ministère des princes des apôtres saint Pierre et saint Paul, et par les hommes apostoliques leurs disciples et leurs successeurs, et est parvenue ainsi intacte, grâce au secours divin, jusqu’à notre médiocrité, sans que les ténèbres des hérésies aient pu l’obscurcir, sans qu’aucune erreur ait pu l’altérer, et Dieu veuille bénir les efforts que fait votre autorité providentielle pour la conserver toujours inaltérable ! Tel a été aussi l’objet constant de la sollicitude du siège apostolique, et de tant de pontifes auxquels nous succédons malgré notre indignité. » (Lettre III Omnium bonorum spes aux empereurs, PL, 87, 1217 et 1220 ; LABBE, Sacrosancta concilia, t. VI, col. 679-682)

Le pape évoque « les pontifes apostoliques mes glorieux prédécesseurs » comme s’étant « acquittés en toute circonstance avec courage, comme tout le monde le sait » à affermir leurs frères selon les paroles du Sauveur. Il est enfin question de la saine doctrine « parvenue ainsi intacte, grâce au secours divin, jusqu’à [saint Agathon], sans que les ténèbres des hérésies aient pu l’obscurcir, sans qu’aucune erreur ait pu l’altérer ». Aussi si tous se sont acquittés de cette tache, cela signifie qu’aucun n’a failli.

Aussi, cela signifie que les propos de saint Léon le Grand, , saint Gélase, Jean II, Pélage II et saint Grégoire le Grand que nous avons cité, se trouvent ainsi « validés » en tant que tels par ces lettres.

Par la suite, le 15 novembre 680, lors de la 4è session du IIIè concile de Constantinople (680-681) réunissant surtout des évêques Orientaux, une lecture fut donnée de la première lettre (PL, 87/1168-1169 et MANSI, 11/239-254). Puis, lors de la 18è session, le 16 septembre 681, ce fut au tour de la seconde lettre lue en public et les Pères du concile l’approuvèrent et l’insérèrent dans les actes du concile. Leur discours prosphonétique aux empereurs est riche en informations. Ils y témoignent de l’autorité du Pape saint Sylvestre sur le Concile de Nicée :

« Arius veut diviser et séparer les personnes adorables de la sainte Trinité ; et aussitôt l’empereur Constantin et l’honorable Sylvestre s’empressent de convoquer le grand et célèbre Concile de Nicée. » (MANSI, XI, colonnes 661 A ; LABBE, VI, 1049-1050)

Ainsi que de la place de premier plan que le Pape saint Damase occupa dans la lutte contre l’hérésie de Macédonius :

« Lorsque Macédonius répandit ses erreurs sur le Saint-Esprit, Théodose et Damase se dressèrent aussitôt contre lui, et Grégoire et Nectaire [ndlr : saint Nectaire de Constantinople fut le successeur de saint Grégoire de Nazianze comme évêque de cette ville] rassemblèrent un synode dans cette ville royale. » (MANSI, XI, colonnes 661 B ; LABBE, VI, 1049-1050)

Contrairement à ce qu’on pourrait croire, ce passage ne signifie pas qu’il présida le Ier Concile de Constantinople via ses légats, ni même qu’il y prit part via une représentation. Nous développons cela dans cet article : https://philosophieduchristianisme.wordpress.com/2018/04/16/la-papaute-au-ier-concile-de-constantinople-381/

Un peu plus tard ils affirment la vérité de la doctrine contenue dans les lettres de Rome :

« Tous unis sous l’inspiration du Saint Esprit, tous d’accord et tous du même avis, acquiesçant tous aux lettres que Notre Très Saint Père et Souverain pontife le pape Agathon a envoyées à Votre Puissance [ndlr : les empereurs], reconnaissant la sainte décision du concile qui dépend de lui et qui rassemble cent-vingt-cinq prélats. […] C’est le souverain prince des apôtres qui a agi de concert avec nous. Nous avons eu, pour nous aider, le pape dont la conduite est conforme à la sienne et qui lui succède sur son siège, le pape qui dans ses lettres déclare le mystère de la vérité divine et sacrée. Rome, cette ville antique, nous a transmis la profession de foi que Dieu avait dictée à saint Pierre. La feuille sur laquelle fut inscrit le dogme a honoré la fin de ce jour ; sur cette feuille on voyait de l’encre, mais c’est réalité c’est saint Pierre qui parlait au travers de l’écriture du pape Agathon. » (MANSI, XI, 663-666 ; LABBE, VI, 1051-1054)

Et dans la lettre qu’ils adressèrent au Pape saint Agathon, mais qui fut reçu par le Pape saint Léon II en raison du décès de ce premier :

« Ainsi que tu le sais, bienheureux Père, aux grandes maladies il faut de grands secours ! Aussi le Christ, notre vrai Dieu, qui est puissance créatrice de toutes choses et qui les gouverne toutes, nous a donné un sage médecin dans la personne honorée par Dieu de Ta Sainteté. A la contagion de la peste hérétique, elle a opposé, avec force, les remèdes de l’orthodoxie, et elle a rendu la vigueur de la santé aux membres de l’Eglise. Aussi, après avoir lu avec joie les lettres de vraie confession que ta paternelle Béatitude a envoyés au très-pieux Empereur, nous te laissons à faire ce qui reste, à toi, évêque du premier siège de l’Eglise universelle, que nous nous abandonnons pour savoir ce que nous devons faire, puisque tu es établi sur le ferme rocher de la foi. Nous reconnaissons que tes lettres ont été divinement écrites par le grand Prince des Apôtres : c’est par elles que nous avons vaincu la secte hérétique, aux erreurs multiples, qui avait surgi dernièrement. […] Nous renvoyons à ta Béatitude ce qui a été traité sur chaque affaire et qui est relaté dans les notes et les présents écrits. […] C’est ainsi qu’illuminés par le Saint-Esprit et instruits par ta doctrine, nous avons détruit les dogmes funestes de l’impiété et aplani la voie très-droite de l’orthodoxie. Notre très-pieux et sérénissime empereur Constantin nous a sagement et divinement assistés et protégés. Ensuite l’un de nous, l’Evêque de cette ville de Constantinople, a été des premiers à donner son adhésion à l’écrit d’orthodoxie que tu as envoyé au très-pieux Empereur. […] Avec toi, nous avons enseigné clairement la splendide lumière de la foi orthodoxe. Nous prions ta paternelle Sainteté de la confirmer de nouveau par tes honorables rescrits. » (MANSI, XI, 683-688 ; LABBE, VI, 1073-1076)

Le déroulé des événements est décrit dans cet article.

Le concile donc, fait non seulement sienne la doctrine de l’infaillibilité Papale de droit et de la perfection de fait de l’enseignement des Papes précédents, ce qui implique l’approbation de ce que nous avons cité des Papes, mais en plus, dans son approbation, le concile identifie lui-même la promesse faite par le Christ a saint Pierre d’être le rocher de l’Église, à l’exercice de l’épiscopat romain : « C’est à toi, évêque du premier siège de l’Eglise universelle, que nous nous abandonnons pour savoir ce que nous devons faire, puisque tu es établi sur le ferme rocher de la foi ».

Nous pouvons et devons souligner à l’attention des Orthodoxes, gallicans, vieux-catholiques et tous ceux qui reconnaissent l’autorité des conciles sans reconnaître celle des Papes, qui liraient notre article, que cette décision conciliaire confirmant la doctrine de la Papauté est non seulement un témoignage parmi les autres de la Tradition, mais encore une sentence infaillible selon les normes théologiques de leurs propres églises. Aussi, après avoir lu cela, ils sont obligés, en conscience, d’accepter la doctrine de la Papauté exprimée dans ces lettres et approuvées par le concile, ainsi que l’intégralité de ce qu’ont enseigné les Papes sur la Papauté (aussi bien son existence en tant que dogme apostolique que la réponse à l’argument que les anti-romains pensent pouvoir tirer de ce même concile contre la Papauté, à travers le cas d’Honorius), le Filioque, le célibat sacerdotal et le baptême des hérétiques, puisque ces lettres affirment aussi la perfection de la doctrine de tous les Papes antérieurs.

C’est le Pape saint Léon II qui ratifia les décret du IIIè concile de Constantinople et qui lui donna sa forme de concile général, lui donnant force obligatoire pour l’Eglise universelle. Il y proclame encore l’infaillibilité du Pape, ratifiant définitivement les sentences précédentes. Voici ses mots :

« Nous avons donc parcouru d’abord avec un extrême empressement les lettres synodiques, dont le langage plein d’élévation nous a frappés. Puis, avec une minutieuse attention, examinant chacune des pièces écrites, les conférant avec les récits des légats apostoliques, nous avons reconnu que le saint, grand et œcuménique concile sixième, réuni avec la grâce de Dieu par décret impérial à Constantinople, s’est conformé dans sa profession de foi dogmatique aux décisions rendues dans le synode œcuménique précédemment tenu à Rome [le concile romain de 680], sous la présidence directe du trône apostolique sur lequel nous sommes maintenant assis. [Saint Léon II expose ensuite en détail la doctrine apostolique proclamée par le concile sur les deux volontés du Christ]. Telle fut en effet la règle de la tradition apostolique et vraie, tracée dans son concile par mon prédécesseur Agathon, d’apostolique mémoire. Cette règle, il la fixa dans la lettre que ses légats remirent de sa part à votre piété, en l’appuyant par les témoignages conformes des Pères et des Docteurs de l’Eglise ; cette règle, le concile général de Constantinople l’a reçue comme un oracle émané du bienheureux Pierre, prince des apôtres ; il y a reconnu la doctrine pure et les marques d’une foi immaculée. Ainsi ce grand, saint et œcuménique concile que votre clémence a réuni, et auquel, pour le service de Dieu, elle a voulu présider, ayant embrassé en tout la doctrine des apôtres et des Pères, ayant reçu avec révérence la définition dogmatique promulguée par le Siège du bienheureux apôtre Pierre, dont, malgré notre indignité, nous tenons la place, à notre tour, nous et par notre ministère le vénérable Siège apostolique lui-même, nous approuvons le décret du concile ; par l’autorité du bienheureux Pierre nous le confirmons comme sur la solidité immuable de la pierre posée par Jésus-Christ pour fondement à l’Eglise. La vénération qui s’attache aux précédents conciles généraux de Nicée, Constantinople, Ephèse, Chalcédoine et Constantinople (deuxième), nous voulons qu’elle soit rendue à cette récente assemblée œcuménique, où le Saint-Esprit vient encore de se manifester pour le salut des âmes et dont toute la gloire dans le Seigneur sera jusqu’à la fin des siècles attribuée à votre piété impériale. » (Lettre III Regi regum, à l’empereur Constantin IV, vers août 682 ; MANSI, XI, 730 et suivants ; PL 96, 404 et 405 ; Mgr Justin FEVRE dans Histoire apologétique de la Papauté, tome 3, page 487, cite ce passage de saint Léon II mais se trompe dans la référence : il indique la colonne 464 au lieu de 404)

Nous avons ici plusieurs éléments. Le premier est que c’est en vertu de l’autorité de l’apôtre Pierre qu’il confirme le concile. Preuve qu’il était clair non seulement pour lui mais aussi pour ses destinataires qu’il était le chef visible et infaillible de droit divin de l’Eglise de Jésus-Christ, et que rien ne pouvait avoir cours sans son approbation expresse ou tacite. Le deuxième est qu’il appelle « oeucuménique » le concile de Rome de 680, réunissant 125 Evêques autour du Pape saint Agathon qui, comme nous l’avons vu, affirme l’infaillibilité des Papes (Saint Agathon, Lettre III Omnium bonorum spes aux empereurs, PL, 87, 1217 et 1220 ; LABBE, Sacrosancta concilia, t. VI, col. 679-682), et en conséquence, d’une part qu’il y croit aussi et ne saurait donc pas condamner Honorius comme hérétique au sens strict, et d’autre part que la confirmation du concile de Constantinople que porte la lettre ne saurait faire de même. Le troisième est le constat que le IIIè concile de Constantinople « pense de même » que ce concile de Rome qui affirme l’infaillibilité des Papes, et qu’il a reçu « comme un oracle émané de la bouche même de Pierre, prince des apôtres », la règle de foi promulguée par saint Agathon, et l’approuve par ce seul motif qu’il a reçu avec révérence cette règle, ce type de la vraie foi, de la tradition apostolique. Pour mieux accentuer encore sa pensée, saint Léon II déclare œcuménique le synode romain tenu par saint Agathon comme nous l’avons dit. Enfin le quatrième, prenant le contrepied du décret conciliaire qui avait mêlé à la définition de la foi les anathématismes, le Pontife donne à la définition de la foi son approbation absolue, quant aux anathématismes, il en détache soigneusement Honorius en spécifiant bien un motif de blâme différent et grandement inférieur à celui des autres, interprétant ainsi de manière authentique l’intention de l’assemblée conciliaire, conformément à ce que ses légats n’auront pas manqué de lui rapporter. Nous démontrons cela dans notre article précité :

L’Infaillibilité du Pape proclamée en 681 ?

34 commentaires sur “Les fondements bibliques de la Papauté (4) : Jean XXI, 15-17 : le Christ confie à saint Pierre la charge de Son troupeau

  1. Pingback: Démonstration de la primauté de Pierre et de la Papauté | +†+Yesus Kristus azu+†+

  2. Pingback: Les manifestations de la primauté de saint Pierre dans le Nouveau Testament | +†+Yesus Kristus azu+†+

  3. Pingback: N’appelez personne « Père  | «+†+Yesus Kristus azu+†+

  4. Pingback: Les fondements bibliques de la Papauté (1): Matthieu XVI, 18: le Christ fait de Pierre la pierre de fondement de son Église | +†+Yesus Kristus azu+†+

  5. Pingback: Si Pierre est le chef, pourquoi les Apôtres se disputent-ils pour savoir qui est le plus grand ?Lorsque vous dites que les Apôtres se disputaient pour savoir qui est le plus grand et que cèle signifie que Pierre n’avait pas la primauté. À la r

  6. Pingback: Si Pierre est le chef, pourquoi les Apôtres se disputent-ils pour savoir qui est le plus grand ? | +†+Yesus Kristus azu+†+

  7. Pingback: Si Pierre est le chef, pourquoi les Apôtres se disputent-ils pour savoir qui est le plus grand ? | +†+Yesus Kristus azu+†+

  8. Pingback: Comment Pierre peut-il être le chef de l’Église malgré son triple reniement ? | +†+Yesus Kristus azu+†+

  9. Pingback: Le sacerdoce catholique est biblique ! | +†+Yesus Kristus azu+†+

  10. Pingback: La preuve biblique de la Papauté 4/5 | +†+Yesus Kristus azu+†+

  11. Pingback: Réponses aux dernières objections contre la primauté et l’infaillibilité de Saint Pierre | +†+Yesus Kristus azu+†+

  12. Pingback: Pourquoi le Christ appelle-t-Il Pierre « Satan » ? | +†+Yesus Kristus azu+†+

  13. Pingback: Saint Pierre a-t-il un successeur ? | +†+Yesus Kristus azu+†+

  14. Pingback: La Papauté depuis les apôtres | +†+Yesus Kristus azu+†+

  15. Pingback: Les fondements bibliques de la Papauté (2) : Matthieu XVI, 19 : le Christ donne les Clés du Royaume des Cieux à saint Pierre et en fait ainsi son premier ministre | +†+Yesus Kristus azu+†+

  16. Pingback: L’Infaillibilité du Pape proclamée en 681 ? | +†+Yesus Kristus azu+†+

  17. Pingback: Saint Pierre a-t-il été le premier Évêque de Rome ? | +†+Yesus Kristus azu+†+

  18. Pingback: La confession à un prêtre date-t-elle de 1215 ? | +†+Yesus Kristus azu+†+

  19. Pingback: Qui de saint Pierre ou saint Jacques avait la primauté au concile de Jérusalem ? | +†+Yesus Kristus azu+†+

  20. Pingback: Le Pape Innocent III a-t-il nié sa propre infaillibilité ? | +†+Yesus Kristus azu+†+

  21. Pingback: Les fondements bibliques de la Papauté (3) : Luc XXII, 32 : le Christ donne à saint Pierre le charisme d’infaillibilité | +†+Yesus Kristus azu+†+

  22. Pingback: Saint Grégoire le Grand et le titre d’ « Evêque universel  | «+†+Yesus Kristus azu+†+

  23. Pingback: Saint Augustin et la fondation de l’Eglise sur Saint Pierre | +†+Yesus Kristus azu+†+

  24. Pingback: Saint Augustin enseignait-il « sola scriptura  ? | «+†+Yesus Kristus azu+†+

  25. Pingback: Les fondements bibliques de la Papauté (2) : Matthieu XVI, 19 : le Christ donne les Clés du Royaume des Cieux à saint Pierre et en fait ainsi son premier ministre | +†+Yesus Kristus azu+†+

  26. Pingback: Un Papiste nommé saint Augustin | +†+Yesus Kristus azu+†+

  27. Pingback: Quinze astuces pour ne jamais devenir catholique | +†+Yesus Kristus azu+†+

  28. Pingback: Les fondements bibliques de la Papauté (2) : Matthieu XVI, 19 : le Christ donne les Clés du Royaume des Cieux à saint Pierre et en fait ainsi son premier ministre | +†+Yesus Kristus azu+†+

  29. Pingback: Les fondements bibliques de la Papauté (2) : Matthieu XVI, 19 : le Christ donne les Clés du Royaume des Cieux à saint Pierre et en fait ainsi son premier ministre | +†+Yesus Kristus azu+†+

  30. Pingback: Réponses aux objections historiques contre la primauté et l’infaillibilité du Pape (1) | +†+Yesus Kristus azu+†+

  31. Pingback: Les fondements bibliques de la Papauté (2) : Matthieu XVI, 19 : le Christ donne les Clés du Royaume des Cieux à saint Pierre et en fait ainsi son premier ministre | +†+Yesus Kristus azu+†+

  32. Pingback: Mon récit de conversion | +†+Yesus Kristus azu+†+

  33. Pingback: La Papauté au Ier Concile de Constantinople (381) | +†+Yesus Kristus azu+†+

  34. Pingback: Le 28è canon du Concile de Chalcédoine (451) | +†+Yesus Kristus azu+†+

Réagir à l'article