+†+Yesus Kristus azu+†+

« Il n’est pour l’âme aliment plus suave que la connaissance de la vérité » (Lactance)

Le Christ avait-il une âme?

Cette question peut paraître, pour bon nombre de chrétiens de nos jours, évidente. Car, qui oserait prétendre que le Christ n’avait pas une âme ? En effet, même le simple fait de poser la question rend tacite la possibilité d’une non-existence d’une âme dans le Christ. Pourtant, nonobstant « l’absurdité » que peut revêtir cette question, cela n’a pas été une évidence pour tous, notamment dans les premiers siècles. La question fut plutôt sérieuse. Certains ont, de fait, penser qu’il n’y avait pas dans la Personne du Christ, une âme. C’est le cas de la christologie de l’arianisme.

Arius était un prêtre d’Alexandrie. Sa doctrine est rejetée au concile de Nicée en 325. Pour résumer la doctrine de ce prêtre, elle consistait à soutenir que le Logos de Dieu a eu un commencement, et donc qu’il n’est pas éternel. Le Christ, Verbe de Dieu, serait donc une simple créature. Mais aussi, Arius niait en quelque sorte la pleine humanité du Christ : il n’était ni pleinement Dieu, ni pleinement homme (il y a donc également la négation de la pleine humanité du Christ). Nous aurons le temps de revenir sur cette doctrine sur ce blog… A la suite d’Arius, est née l’arianisme, et parmi les penseurs soutenant cette doctrine, il faut relever l’antipape Felix II (353-365), et surtout Eudoxe de Constantinople. Le texte de ce dernier que nous allons lire dans les lignes qui suivent, exprime la négation d’une âme dotée d’intelligence dans le Christ. Nous lisons à cet effet :

« Nous croyons (…) en un unique Seigneur, le Fils, qui est pieux en tant qu’i vénère le Père, qui est d’une part unique engendré et supérieur à toute la création autour de lui, d’autre part premier-né, parce qu’il est la plus excellente et la toute première entre les créatures ; qui s’est fait chair, mais non pas homme. En effet, il n’a pas assumé une âme humaine mais il est devenu chair, afin qu’à travers la chair comme à travers un rideau ce dieu ait affaire aux hommes. Il n’y avait pas deux natures, puisqu’il n’était pas homme complet et qu’au lieu d’âme, ce dieu était dans une chair ; l’ensemble était par composition une nature unique ; il était passible du fait d’une économie, car ni la souffrance d’une âme ni celle d’un corps n’aurait pu sauver le monde. Qu’on nous réponde donc : comment celui qui est passible et mortel peut-il être consubstantiel avec le Dieu qui est supérieur à tout cela, qui transcende la passion et la mort ? »

Nous voyons donc que dans cette profession de foi, il y a plusieurs vérités de foi qui sont niées ! Eudoxe de Constantinople présente le Christ comme une simple créature, et non comme le Créateur lui-même, et par conséquent, il y a la négation de la consubstantialité du Fils au Père, et à l’homme. Cependant, le Christ est vu comme « supérieur » par rapport aux autres créatures : ces quelques éléments constituent « l’essence » même de l’arianisme. Ensuite, Eudoxe de Constantinople reconnaît pleinement l’expression du livre de saint Jean (I, 14), à savoir que le « Verbe s’est fait chair ». Cependant, de là, Eudoxe ne conclut pas que l’expression « s’est fait chair » implique la pleine humanité du Christ, ce qui est une erreur, car le Christ est vraiment pleinement homme. Et lorsque l’évangéliste affirme que le « Verbe s’est fait chair », cela signifie bien sûr « l’Homme entier », âme et corps. Les conciles de Constantinople en 381 et de Nicée I en 325, exprimeront que le « Christ s’est fait chair », et ajouterons « s’est fait homme » ; ôtant ainsi toute ambiguïté. Mais, il n’est pas certain que le Concile de Nicée I, en s’exprimant ainsi, ait voulu prendre position sur la question de l’âme du Christ. Cela apparaîtra plus tard.

Une autre conséquence majeure du texte que nous venons de lire repose sur le fait que, si le Christ n’a pas d’âme, il faudrait attribuer ses souffrances et ses angoisses à la nature du Fils de Dieu. Par conséquent, le Fils ne peut être consubstantiel au Père, puisque la nature divine ne peut être soumise à la souffrance. En fait, c’est la nature même du Logos qui prend la place, qui remplace le rôle de l’âme. On constate donc que la négation de la divinité du Christ et la négation de son âme sont liées. On peut donc conclure que, comme le Christ a souffert, et que ce dernier n’avait pas d’âme, c’est la nature même du Logos qui a souffert. Or, il ne convient pas d’attribuer la Divinité au Christ, du moins au même titre que le Père. Car, la nature divine ne peut être passible.

Un autre arien, Lucien, évêque d’Alexandrie de 373 à 378 s’exprime en ces termes :

« (…) Mais s’il avait eu une âme humaine, les impulsions de Dieu et celles de l’âme seraient nécessairement entrées en conflit. Car chacune d’entre elles a en soi le principe de l’auto-détermination et vers des activités différentes ».

Il n’est pas ardu de déceler, dans cette proposition de l’évêque, le sophisme : celui de prétendre que l’âme humaine et la nature divine se seraient opposées. Ce raisonnement fallacieux est le même rencontré dans la crise monothélite – qui soutenait que, si en Christ il y avait deux volontés, la volonté humaine se serait forcément opposée à la volonté Divine. Les problèmes concernant le Salut, suivant la doctrine « arienne », s’imposent. Si le Christ n’est pas vraiment homme, car privé d’une âme raisonnable, et donc d’une liberté, comment le Salut est possible ? En effet, pour que le Salut soit possible, le Christ DEVAIT LE VOULOIR !

La réponse de Tertullien est simple ! Il s’exprime en ces termes : « Il a pris les deux substances (substantia) de l’homme, la chair et l’âme (carnem et animum) » (Contre Praxéas XVI, 4 ; CCSL 2, 1181). De plus, les évangiles nous parlent de l’âme du Christ : « Alors il leur dit : mon âme est de toutes parts saisie de tristesse jusques à la mort ; demeurez ici, et veillez avec moi » (Matthieu 26, 38 ; Bible Martin).

Origène quant à lui, néo-platonicien, va proposer une autre solution. Pour lui, le rôle de l’âme avait été d’être intermédiaire entre Dieu et la chair. Et Origène s’oppose à cet effet au docétisme sur ses deux plans (celui qui nie la réalité de la chair du Christ et celui qui nie l’âme ; nous reparlerons également de cette hérésie sur ce blog). Nous lisons dans le Traité des principes :

« De cette substance de l’âme servant d’intermédiaire entre un Dieu et la chair (car il n’était pas possible que la nature de Dieu se melât à la chair sans médiateur), Dieu naît homme : cette substance était l’intermédiaire, elle pour qui il n’était pas contre nature de prendre un corps ; et de même il n’était pas contre nature que cette âme, comme substance raisonnable, puisse contenir Dieu (…) ».

Il faut reconnaître dans le Christ une âme, dans le cas contraire, on ne peut assurer sa pleine humanité. Car, cette dernière, justement vient de la composition entre l’âme et le corps.

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Un commentaire sur “Le Christ avait-il une âme?

  1. Miss Tanessa
    20 mars 2016

    Merci! 🙂 Ce texte m’inspire un chant particulièrement beau et qui porte à la prière: « Anima Christi » – « Âme du Christ » qu’on peut écouter sur ce lien (en latin et en français) : http://notredamedesneiges.over-blog.com/article-17244160.html

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Cette entrée a été publiée le 20 mars 2016 par dans Foi Catholique, et est taguée , , , , .